Club philatélique de Payerne et environs

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La Broye et l'aviation

 

Les prémices

1 9 1 0 est une grande année pour Payerne et Avenches. On parle d’exploits plus ou moins réussis et de curieux parcours dans le ciel broyard !

René GRANDJEAN construit seul son aéroplane-monoplan dans la menuiserie de son père à Bellerive. C’est le ferblantier SIMONET et le charron BESSARD qui lui apportent de précieux conseils. Tout le monde parle de cette fameuse machine à voler, mais personne n’y croit vraiment.

Les essais ont lieu à l’Estivage d’Avenches, un terrain plat propice, sous les yeux émerveillés et attentifs d’un petit bonhomme, Ernest FAILLOUBAZ.

 

Le « Gamin Volant »

Ernest Failloubaz vécut ses premières années dans la maison familiale de Vallamand-Dessus (Vully vaudois)

 

Son père Jules est un fils de paysan riche, sa mère Emilie Heuberger est la jolie fille du boulanger d’Avenches. Peu de temps après le mariage, le père et la tante de Jules meurent brusquement, ce qui fait naître des rumeurs bizarres dans le village.

Son père décède à son tour, d’une tuberculose, sans doute.

Cette mort suscite d’acerbes et méchants commentaires… Ernest n’a qu’une année, et cette triste affaire le poursuivra toute sa vie. On lui attribue un tuteur, et il se retrouve à Avenches chez les parents de sa mère qui le gâteront. Il est orphelin à 8 ans. Il est doué à l’école, mais ses camarades lui rendent la vie difficile. Il voudra prouver à tous qu’il est un homme et qu’il saura réussir sa vie, malgré les difficultés. A 10 ans, sa passion pour les avions est réelle. L’idée de voler le captive, et il est féru de mécanique. Il retrouve en Grandjean, le père disparu et le compagnon idéal pour ses projets.

 

Le mois de mai avenchois

Lisons le Journal de Payerne du 10 mai… Il y a maintenant à Avenches deux aéroplanes remisés à l’ancienne fabrique de meubles Delorme-Bessard.

Celui de M. Failloubaz, du système Santos-Dumont, sort des ateliers français Levallois-Perret. Mardi, son propriétaire a réussi à décoller sur une cinquantaine de mètres. Jeudi après-midi, les essais ont repris, mais le vent était trop fort…

Le deuxième aéroplane, une superbe machine du système Blériot fait honneur à son jeune constructeur, M. René Grandjean, fils de l’ancien syndic de Bellerive. Il n’est pas tout à fait au point, mais on espère que tout ira dans quatre ou cinq jours… Il pourra tenter la chance et s’envoler. Le 20 mai, dit le Journal, il s’est élevé très facilement et avec rapidité à 20 m de hauteur, et s’y est maintenu sur une distance de 300 m.

 

Document montrant les deux amis avenchois

 

Le journaliste veut montrer son savoir et donne les détails techniques de l’avion construit : 25 m2 de surface, 10 m 50 de longueur et 11 m d’envergure. Son poids est de 360 kg et il est muni d’une hélice de 2 m 30 actionnée par un moteur de 40 chevaux à 8 cylindres.

On nous annonce que Failloubaz attend l’arrivée d’un nouveau Blériot et que le hangar de la gare abrite l’aéroplane de M. Cailler de Broc.

 

Le vol Avenches – Payerne

 

Le 6 juin on annonce déjà qu’une envolée sera tentée jusqu’à Payerne. Mais la mise au point se fait attendre.

Le 27 septembre, Failloubaz s’envole d’Avenches. Tout semble se dérouler normalement, lorsque le moteur tombe en panne près de la gare de Domdidier. L’avion perd de l’altitude et se pose sans dégâts dans un champ de regain fraîchement coupé. Tout est à refaire…

 

Le lendemain, le 28 septembre, en fin de journée, le jeune pilote tente un nouvel exploit. La foule toujours plus nombreuse attend à la Place d’Armes, près de l’Arsenal de Payerne. Elle voit surgir à l’horizon un grand oiseau qui s’avance avec une grande rapidité. Il vient atterrir doucement à la hauteur des cibleries.

 

Il est cinq heures et demie, et le trajet n’a duré que 9 minutes. Le jeune homme semble étonné de soulever un tel enthousiasme. Les demoiselles lui donnent un mouchoir ou des feuilles de carnet à signer… Pour les remercier de cette chaude réception, Failloubaz remonte sur sa machine, s’envole avec grâce et fait de nouveau une promenade au-dessus de la ville. Il atterrit de nouveau avec grâce.

 

  

Emile Perrin, Syndic et député, vient en personne féliciter le héros du jour. Il invite le pilote et quelques amis d’Avenches, qui ont accompagné l’avion en voiture, pour un verre de l’amitié, et un repas à l’Hôtel de la Gare.

 

Le meeting d’Avenches

L’exploit du 28 septembre et les discussions animées du soir ont amené l’idée de l’organisation d’un meeting d’aviation à Payerne. Ernest Failloubaz a déjà donné son accord, mais les Avenchois sont persuadés que leur ville est le véritable berceau de l’aviation, et que c’est à elle d’obtenir la première fête de l’aviation dans la Broye. On annonce donc un meeting pour le dimanche suivant.

 

 

Le terme « improvisé » est bien réel, puisqu’on devra reporter d’une semaine la manifestation. Il faut soigner les infrastructures, préparer les billets, les affiches, les demandes officielles, le service d’ordre…

Le 8 octobre, le temps est idéal, couvert, mais sans vent. Failloubaz est allé à Berne pour toucher son brevet de pilote numéro 1 et il a reçu des mains du Président de la Confédération, le Neuchâtelois Robert Comtesse une magnifique montre en or…

 

 

Le vol commence avant l’heure car le « Gamin volant » a tenu à saluer au passage le ballon « Mars » qui a quitté Lausanne et qui survole les marais.

Le pilote effectuera 4 vols, avec sa correction habituelle et se permet quelques acrobaties audacieuses.

Cailler qui a fait une chute la veille n’est pas là, et l’appareil de Grandjean n’est pas prêt. Failloubaz est le héros de la journée et lorsqu’il passe près du château dont la terrasse est noire de monde, c’est un triomphe…

 

Le meeting de Payerne

Payerne a laissé à Avenches l’honneur de la première fête d’aviation broyarde. Un Comité est mis sur pied et la date du 23 octobre est réservée.

 

 

Le Préfet Cornamusaz a bien essayé de faire reporter le meeting d’une semaine, car ce dimanche-là une votation fédérale sur l’introduction de la proportionnelle doit retenir tous les bons citoyens… On ne peut reculer.

Mais ce qui n’était pas prévu, c’est la réception (voulue ou non) que les autorités d’Avenches ont réservée aux pilotes le soir précédent. Le vin coule à flot, et la soirée dure jusqu’au matin…

 

A 11 heures le 23 octobre, aucun appareil n’est en place à Payerne. Enfin Cailler arrive avec son automobile et l’avion amarré derrière. Failloubaz est annoncé au train de 2 heures.

 

20'000 personnes envahissent la place et de nombreux trains spéciaux sont arrivés de Lausanne, Berne et Genève. 3 appareils sont maintenant côte à côte, celui de Grandjean en piteux état. A 3 heures 40, le Blériot de Failloubaz s’élève légèrement, vire et se pose au milieu des acclamations. Encore un petit vol, et au troisième essai il vient échouer son avion au milieu des marais…

 

Cailler essaie inutilement de mettre son moteur en marche, au milieu de nuages de fumée. Grandjean se décide à monter les ailes de son appareil. Mais comme les stabilisateurs sont restés à Avenches, on ne peut partir…

La foule s’impatiente et commence à murmurer. Elle envahit le terrain et force les barrières de sécurité. Elle empêche même, Failloubaz qui voulait repartir avec l’avion d’un de ses amis de tenter un départ…

 

 

Les officiels ont disparu, les cocardes fièrement portées, sont jetées au sol. Les cartes postales sont déchirées. Seules les deux fanfares de la ville, bénévoles, essaient d’apporter un peu de fraîcheur. Les 12'000 voyageurs des trains devront encore supporter la cohue et la mauvaise humeur.

Le « Guguss » journal satyrique et humoristique de Genève se fera un plaisir de goriller ces paysans broyards pour cette organisation foireuse…

 

 

On parlera pendant des mois de la fête ratée. Des excuses, des reproches sont publiés dans les journaux et il faudra 2 ans pour régler les comptes et décider ce que l’on donnera aux pilotes qui n’ont pas tenu leurs promesses…

 

 

Merci à Nadine Grognuz pour les sources et les photos tirées de son travail de maturité au gymnase intercantonal de la Broye !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



05/02/2011

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